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Est-ce qu’un pharmacien commet un acte dérogatoire à l’honneur ou à la dignité de sa profession en incendiant sa pharmacie suite à la consommation de drogues?

Le conseil de discipline de l’Ordre des pharmaciens du Québec nous répond à cette question dans l’arrêt du 26 septembre 2016 : Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Arbach, 2016 CanLII 67920 (QC CDOPQ).

Un pharmacien sous l’emprise de drogues et souffrant de symptômes psychotiques, a mis le feu à sa pharmacie. Le syndic de l’ordre estime que son acte est contraire à l'article 59.2 du Code des professions décide d’engager une enquête :

« 59.2. Nul professionnel ne peut poser un acte dérogatoire à l'honneur ou à la dignité de sa profession ou à la discipline des membres de l'ordre, ni exercer une profession, un métier, une industrie, un commerce, une charge ou une fonction qui est incompatible avec l'honneur, la dignité ou l'exercice de sa profession. »

Dans cette décision, le Conseil de discipline nous rappelle que bien qu’aucun texte du Code des professions ou du Code de déontologie des l’ordre des pharmaciens ne permet de sanctionner un tel acte, l’article 59.2 du Code des professions le permet si cet acte est dérogatoire « à l'honneur ou à la dignité de sa profession ou à la discipline des membres de l'ordre ».

Le Conseil de discipline rappelle aussi les obligations qui s’imposent à lui lorsqu’il doit évaluer la nature d’un acte reproché à l’un de ses membres. Il doit ainsi examiner la « question de l’identification objective du caractère dérogatoire à l’honneur, la dignité ou la discipline de la profession du comportement reproché en se préoccupant d’abord de la protection du public et aussi analyser le caractère dérogatoire du comportement reproché en considération de la notoriété, de la réputation et de la crédibilité de la profession. "

En vertu du Code de déontologie des pharmaciens, qui édicte notamment que le « Le pharmacien a le devoir primordial de protéger et de promouvoir la santé et le bien-être de ses patients; il doit notamment aider ceux-ci à retirer tout le bénéfice possible de leur thérapie médicamenteuse. » (art. 6 Code de déontologie des pharmaciens), et que « Le pharmacien doit mettre en place dans sa pharmacie les mesures de sécurité requises afin de préserver la confidentialité des renseignements personnels et l'intégrité de ses inventaires et médicaments. » (art.15 du Code de déontologie des pharmaciens), le conseil de discipline de l’ordre des pharmaciens du Québec estime que ce pharmacien a ébranlé la confiance avec ses patients, puisque suite à l’incendie, il les a empêchés d’avoir accès à leur thérapie médicamenteuse et à leur dossier médical.

De surcroît, le conseil de discipline relève le caractère violent de l’acte,qu’il estime « tout à fait incompatible avec la confiance que doit pouvoir avoir un patient à l’égard du professionnel chargé de prendre soin de sa santé et de son bien-être. »

Le Conseil de discipline rejette au passage les moyens de défense liés à l’intoxication découlant de la consommation de drogues, au motif que « l’intoxication est contraire aux valeurs de la profession. »

Par conséquent, le conseil de discipline estime donc que le pharmacien a posé « un geste qui comporte un degré de gravité certain de sorte qu’il constitue une faute disciplinaire. (…) En s’attaquant au lieu où le public est en droit de recevoir des services hautement professionnels, alors qu’il est intoxiqué, (le pharmacien) entache l’honneur et la dignité de la profession de pharmacien. ».

Le conseil de discipline le déclare donc coupable d’avoir commis un acte dérogatoire à l'honneur et à la dignité de sa profession en ayant incendié sa pharmacie en vertu de l’article 59.2 du Code des professions (RLRQ, c.C-26).